mercredi 17 avril 2013

Le soleil est catalan

Cher(e)s toutes et tous, j'ai une bonne nouvelle pour vous!



Pour le plus grand bonheur de celles et ceux qui ne sont pas parti(e)s folâtrer en vacances, je vous propose de venir goûter ce samedi toute la journée aux vins de Pierre-Nicolas Massotte (Le Clos Massotte, 66 - Trouillas). Cinq vins qui touchent le coeur, plein de vie, de sève, d'entrain, exhalant de doux parfums d'utopie...



Primo il s'agit d'un retour attendu de deux cuvées, toutes les deux sur le magnifique millésime 2007:

Yeleen 2007 (Côtes du Roussillon rouge) est un assemblage de grenache noir et de carignan (40/40) complété d'un peu de syrah. On retrouve les qualités du millésime précédent, encore un cran au-dessus grâce aux superbes jus cette année-là. Fruits noirs confiturés (myrtille), réglisse, encens, eucalyptus... Le tout servi sur une bouche ample, charnue mais toujours soyeuse et finissant longuement sur une pointe d'épices douce et de cacao. La fraîcheur est elle aussi au rendez-vous, démonstration (s'il en est encore besoin de la faire) du travail exemplaire accompli à la vigne comme à la cave, sans le moindre recours à de quelconques artifices inutiles. Cerise sur le pudding: c'est aussi un excellent rapport qualité/prix.

Gaïa 2007 (Côtes du Roussillon rouge) fait intervenir les mêmes cépages (mais sur les vieilles vignes du domaine: 40% de syrah, 30% de grenache noir et 30% de carignan, âgées de 80 à 100 ans) et est élevé sous bois durant 24 mois. Le temps nécessaire pour dompter la puissance et lever doucement le voile sur des arômes plus évolués (griottes macérées, sous-bois) plus un peu de cassis, mûre, chocolat noir. En bouche c'est certes plus opulent que Yeleen (quelles épaules mes amis!), mais c'est sans lourdeur aucune que les tanins viennent enrober le tout dans une finale harmonieuse où tout est délicatement posé à sa place. Un vin très feng shui quoi ;-)

En plus de ce réassort bienvenu, trois nouvelles cuvées complètent le tableau:

Perle et Pépin 2009 (Vin de France rouge), toujours sur la même modalité syrah/grenache/carignan (vignes identiques à celles qui ont enfanté Gaïa) mais dévoilant une facette encore différente des vins précédents. Le vin a longuement fermenté, car il a peiné à "finir ses sucres", pour se stabiliser enfin au terme de 3 années. Trois ans dont il avait besoin pour gagner une patine qui fait toute sa personnalité. Car ici, c'est dans le raisin frais et ultra mûr qu'on croque, un peu sauvagement, à même la vigne, au plus près de la nourrice. Ça sent la rafle, c'est bon, c'est juteux aussi, puis voici que la trame granuleuse et dense échappe soudainement à la gravité, on marche sur la pointe de pieds le long d'un tapis de tanins poudrés parsemés de notes florales. Un vin chamarré, moiré, qui rappelle le Holi des Indiens, la "fête des couleurs" où tout le monde s'éclabousse joyeusement à grands coups de bleu turquoise, de rouge lumineux, de jaune scintillant...

Avec Corail d'automne 2007 (Vin de Pays des Côtes Catalanes blanc), Pierre-Nicolas nous démontre qu'il n'est pas seulement un vinificateur de rouge hors-pair mais qu'il sait tout aussi bien appréhender l'identité forte des blancs secs catalans. Un pur grenache blanc issus de vignes de 80 ans élevé 2 ans en barrique sans ouillage (entendez par là sans refaire les niveaux, puisque le vin ça s'évapore aussi...). On pourrait s'attendre à une oxydation marquée prenant le pas sur le reste des arômes mais que nenni, ce qui ressort ce sont des notes fraîches et exubérantes de verveine, de citron vert, de zestes d'orange, puis une pointe de miel, de fumée, d'encaustique. Le vin est sec, la bouche est vive juste ce qu'il faut, riche, herbacée et fruitée, un peu saline également. Diable, c'est complexe cette affaire!

Terminons avec une gourmandise: Ondine 2012 est un rosé croquant issu de l'union du mourvèdre et de grenaches gris centenaires. Évoluant gracieusement dans un registre demi-sec, il délivre une prose odorante tout droit sortie d'un jardin sévillan (des notes fraîches de fraises, de melon d'eau, de pêche, d'agrumes...). C'est croquant et délicieux, la finale possède un joli relief et se termine sur de beaux amers racés. Ondine attendait patiemment que vous sortiez le salon de jardin...

Alors? Heureux? :-)
Rendez-vous samedi!

Laurent, caviste

PS: une bonne nouvelle n'arrivant jamais seule, je me lance dans le commerce de l'ultime apparat pour vous pavaner en terrasse (la classe américaine pour 4,90€/pièce, artwork by Ma2line, nombreux modèles à admirer sur place) :




mercredi 10 avril 2013

Le soleil n'est pas encore là?

Qu'importe, il est dans les raisins! (et pas seulement, d'ailleurs)

Les lignes suivantes illustrent à merveille mes propos avec ces jolis coups de coeur, au sein d'une sélection majoritairement locale:

Michel Quenioux à Cheverny (domaine de Veilloux) fait ses vins comme un luthier ses instruments de musique, rien d'étonnants donc que chaque bouteille sonne parfaitement juste dans un registre plus proche du Boléro que de Johnny be good. À l'inverse de ce qui se pratique autour de nous ces derniers temps voici enfin une preuve que rigueur ne rime pas nécessairement avec austérité...
Par les temps qui courent je suis certain que vous apprécierez les bienfaits d'une telle démonstration ;-)

Le blanc domaine 2010 s'ouvre d'abord discrètement sur les fruits blancs, un bouquet de fleurs blanches et une pointe de pomélo (avec un peu d'aération viendront s'y ajouter des senteurs musquées, de l'orange, de l'anis ainsi que quelques notes de confiture de lait à mesure que le vin s'épanouit à l'air et devient plus aromatique et enjôleur). En bouche, on est séduit par l'harmonie générale, l'équilibre entre fraîcheur et rondeur le tout parfaitement arbitré par une pichenette d'amertume. Le rouge de la même gamme (toujours en 2010) se livre immédiatement, épices et fruits rouges en avant (airelles, cerise, groseille) tandis que la bouche est tout en fluidité, ménageant l'espace pour des tanins poudrés qui "portent" une finale poivrée et longue couronnée par de très beaux amers.

La cuvée les Veilleurs, également dans les deux couleurs mais sur le très beaux millésime 2009, présente un travail plus ambitieux qui mise sur les capacités du temps. Le blanc présente des notes séduisantes de menthol et de citron confit avec une sapidité et une élégance admirables alanguies juste ce qu'il faut par un joli gras parsemé de fleurs séchées. Le rouge est très floral lui aussi (pot pourri de rose et pivoine), atramentaire (registre aromatique, ici les odeurs d'encre, de graphite/mine de crayon), ça donne un nez envoûtant de souk. En bouche c'est épicé et salivant, les tanins sont serrés et la finale très longue.

Étonnant de voir à quel point de si jolis vins peuvent à la fois sortir des sentiers battus tout en évitant chaque écueil... Le travail de fond de Michel n'y est pas pour rien, voilà une belle démonstration de ce que peut donner la pratique appliquée de la biodynamie sur une appellation injustement boudée des étals et ce malgré des rapports qualité/prix très alléchants (Domaine 8,50€ / Veilleurs 10,50€)


Autre figure du Loir-et-Cher: Jérôme Sauvète, à Monthou sur Cher. Là-aussi, les vins parlent pour le bonhomme. J'ai spécialement retenu la cuvée les Gravouilles qui est un 100% gamay offrant ce qu'il faut de caractère pour trouver sa place à table sans passer inaperçu (le nez d'abord fumé dévoile de jolies notes de fruits juteux, comme la pêche de vigne par exemple, la matière est là, dense mais aérienne, et "porte" le vin). Là aussi, c'est bon et abordable (8,50€), et le raisin comme le buveur sont respectés l'un et l'autre (AB depuis... longtemps).



Restons en Touraine, et ouvrons la porte cette fois-ci à un petit nouveau, Nicolas Paget. Le concernant (il reprend le vignoble familial), les changements entrepris à la vigne (conversion en cours) ne sont pas encore perceptibles dans les vins, ce qui ressort très fort c'est un sacré talent de vinificateur, et c'est ça qui m'a séduit. D'ici quelques années, lorsque lui et ses vignes parleront à l'unisson, ça risque de frapper fort sur les coteaux de Rivarennes! J'ai retenu trois vins:
Le chenin "tendre" (Opus 2011, entre sec et demi-sec) est onctueux et aérien et sonne juste à l'apéritif comme à table (une merveille sur un rôti de veau grand-mère en cocotte, avec une louche de crème), le rosé demi-sec Gourmandise joue quant à lui une partition "canaille" et son profil acidulé propose un parfait compromis entre vivacité et sucre. Enfin le Côtcerto, sur le magnifique millésime 2009 enfile un costume tout à la fois classe et baroque avec ses effluves boisés et exotiques (noix de coco fraîche, mais aussi caramel, réglisse, encens, fumée), les fruits rouges confiturés lui apportent un côté "forêt noire" sans le laisser sombrer dans la lourdeur. Grâce à sa fraîcheur et aussi à un joli grain de tanin, le vin est souple et dégage une impression noble de puissance maîtrisée qui déroule un final magistral sur l'humus frais, le sous-bois. En résumé, un côt (malbec) comme on aimerait en boire plus souvent, et encore une fois là aussi un excellent rapport prix/plaisir (10€).


La jeune garde angevine prend le relais avec Thomas Carsin (le Clos de l'Élu, à Saint Aubin de Luigné). Là aussi trois vins dans les trois couleurs:

Terre! (blanc 2011, 10,80€) dresse un portrait gastronomique du sauvignon comme il y en a peu de ce côté-ci du Val de Loire, un nez de fruits blancs assez discret qui prépare une bouche parfaitement équilibrée entre des amers fins, une acidité bien balancée, et une finale légèrement saline avec une pointe de brioche. On l'imagine très à l'aise sur des poissons blancs à chair ferme cuits à l'huile d'olive ou grillés (un dos de cabillaud aux herbes fraîches lui ira très bien). Le rouge l'Aiglerie (Anjou 2011 pur cabernet franc 15€) ne cache pas son ambition, c'est cossu comme une cave à cigare, le boisé est parfaitement intégré et se prolonge sur des notes exotiques (coco, vanille, poivre) et torréfiées. En bouche c'est ample et rond, presque crémeux, les tanins sont fins et serrés et la finale est longue et harmonieuse. Enfin, une superbe bulle (Les Dames de Nage 2010 rosé extra brut 16,40€), infiniment complexe à tous les étages (nez original un peu résiné, pâte d'amande, calisson d'Aix, melon, bouche aérienne, bien sèche, et finale gourmande sur les épices douces (muscade, pain d'épices, spéculoos, pointe d'anis). Le cépage grolleau (100%) porte ici parfaitement son nom.





Terminons avec quelques flacons exotiques en provenance d'Afrique du Sud (Beaukett 2012, muscat demi sec vif et aromatique à souhait, il paraît qu'il va faire beau ce weekend!) et du Chili, où j'apprécie de plus en plus les domaines La Roncière et Emiliana (dont parmi vous quelques-uns se sont déjà laissés surprendre par les qualités du Carménère 2011, d'ailleurs il en reste un peu). Chez la Roncière, en complément de la syrah (Cantoalba Shiraz 2010) et du chardonnay (Moussai 2011), vous découvrirez un étonnant cabernet sauvignon répondant au nom de Chaku (2010, 10€), merveille de cassis juste mûr aux tanins tendres et ciselés ainsi que le pinot noir Cantoalba (2011, 11,50€) aux accents bourguignons certes mais dans un registre qui demeure singulier. Autre pinot noir mais dans une expression complètement différente, El Rincon 2011 de chez Émiliana, en tous points une superbe bouteille (nez eucalyptus, fruits noirs, noix de coco, boisé "noble", bouche très élégante, prégnante, toucher de bouche soyeux, grande fraîcheur qui contrebalance une belle richesse tactile, c'est dense d'accord mais toujours équilibré et ça se termine en apothéose sur un exubérant sirop de fruits rouges à se damner...). Grosse impression qui justifie largement l'investissement (25€) et qui peut laisser pantois bon nombre d'amateurs éclairés.




Côté "boissons viriles", quelques nouveautés également:
Single malt Bunnahabhain 2007 Cask Strength (Islay) 50,1° The Ten #09: un brut de fût pour les gens qui veulent une tourbe puissante associée à un profil salin (algue), humus et pomme fraîche. Pour connaisseurs.
Single malt Lands of Scotland (Islay) 40°
Plus consensuel et moins "rentre dedans" que le précédent, ce single malt également tourbé et marin n'en demeure pas moins intéressant par son onctuosité et ses jolies notes de malt.




Restons dans les îles d'Écosse avec la gamme Gaelic Distillers en provenance de Skye dont les blends deluxe Mac Namara 40° (littéralement "le fils de la mer", sec et viril, davantage iodé que tourbé, 28€) et Té Bheag 43° ("la petite dame des îles", assemblage de 8 à 10 ans, floral, iodé, légèrement tourbé à la finale pâtissière marquée par le sherry, 35€) sont une parfaite introduction à un travail soigné et clairement orienté vers le qualitatif. La déclinaison des pure malts Poit Dhubh ("alambic illicite") vient compléter le tout, avec un 8 ans structuré aux arômes miellés et floraux prolongé par un fumé délicat (44€), un 12 ans plus évolué, sur le velours, l'iode et les épices (61€) et enfin un 21 ans fumé et épicé (vanille, chêne) qui finit tout en douceur (105€).


Du Japon, retour des whiskies de chez Nikka (From The Barrel 51,4°, Pure Malt White 43°, Coffey Grain 45°, Yoichi 10 ans 45°), et des États-Unis retour très attendus aussi du Single Barrel 2002 de chez Evan Williams (Kentucky Straight Bourbon 43,3°).




Les bières écossaises des frères Williams sont arrivées à bon port elles aussi (Roisin, Harvest Sun, Seven Giraffes, Birds and Bees, Good Times, Joker IPA et... Ginger Ale, 3,00€/pinte ou 11+1 offerte).

À ce sujet, je vous rappelle une dernière fois qu'un atelier bière belge est prévu demain jeudi 11 avril de 18h30 à 19h30 à la boutique. Le nombre de réservations n'étant pas encore suffisant j'espère que quelques indécis viendront confirmer l'évènement très rapidement (1 heure, 4 bières, les informations-clé qui vont bien, 12€/personne). Réservation au 0247265583 ou par retour de mail.

Merci de vôtre attention ;-)

Laurent, caviste en malts d'amour