samedi 14 mars 2009

Les vins du millésime 2008 manquent de rondeur


Voilà une affirmation à même de susciter bien des interrogations...
C'est pourtant un des très nombreux exemples d'arguments employés par les divers laboratoires vendant du conseil et des produits chimiques aux vignerons. L'image ci-contre servira d'exemple.

La pharmacopée accessible d'un simple clic est impressionnante par sa diversité (plus de 300 "solutions" servant à "corriger les défauts", à "maquiller le vin", ou à cacher la misère, c'est selon), mais elle l'est aussi par la grande latitude laissée par une règlementation très permissive en matière de vinification, car tout ceci est parfaitement légal (je fais donc ici une impasse volontaire sur les produits synthétiques employés à la vigne, dont on sait que la France est le 2ème pays le plus dépendant au monde après les États-Unis, avec 78000 tonnes/an pour l'agriculture française en général, dont un bon cinquième pour la seule viticulture...).
Lise et Bertrand Jousset, jeunes talents de l'appellation ligérienne de Montlouis sur Loire, reçoivent régulièrement ce type de messages...
On peut aisément penser qu'en des périodes comme celle que nous vivons, riche en tensions économiques et autres rapports de force avec les banquiers, la tentation est grande "d'assurer le coup" en ayant recours à la poudre de perlimpinpin en vente sur ce site.
Bactéries pour activer les fermentations malolactiques, lysozymes (puissant allergène) pour les bloquer, levures pour les fermentations alcooliques, tanins, solutions contre les goûts de moisi (!) et les bactéries indésirables (la fameuse brettanomyces cerevisiae qui faisait la typicité des vins de Chinon il y a encore quelques dizaines d'années qui est aujourd'hui considérée comme un défaut du vin), enzymes et acides tartrique et ascorbique pour amplifier le fruité et la fraîcheur du vin, protéines (bentonite), gélatine de bovidés et albumine de poisson pour le clarifier, anhydride sulfureux (puissant corrosif des muqueuses internes) pour le stabiliser, le conserver, le préserver de l'oxydation, acide métatartrique pour empêcher les précipitations de tartre en bouteille (signe qu'un vin continue de "vivre" en bouteille, faut-il le rappeler?)...
Et le tout en pastilles, en granulés, en gaz, en liquide...
On se plaint de la concurrence des vins du nouveau monde, alors que localement toutes les options sont disponibles pour gommer la singularité d'un terroir! Sur le bout de la langue : uniformisation et standardisation.
Un pinot noir doit sentir le pinot noir, n'est-ce pas là une remarque pertinente qui répond à une logique implacable? Ce serait bougrement intelligent si et seulement si on ne parlait pas d'une matière vivante donc par définition toujours en mouvement.
Les populations qui ne sont pas imprégnées d'une culture viticole saisissent rarement la nuance de ce vocable galvaudé, le "terroir". Il suffit simplement de constater que les mêmes pratiques, appliquées au même cépage, sur un même millésime, donnent pourtant des résultats différents.
Alors quoi? Quels sont les paramètres qui différencient ces vins qu'il serait tellement plus facile de considérer comme des items issus d'une même "chaîne de production"?
Cette "zone d'ombre" abrite toutes les caractéristiques que nous recherchons pour expliquer le terroir, on citera dans le désordre l'âge des vignes, leur porte-greffe, la nature géologique des parcelles, leur altitude et leur exposition, les vents dominants et pourquoi pas les champs magnétiques et telluriques, le mode de conduite (taille, ébourgeonnage, type de culture, rendement..), les choix de vinification et d'élevage (liste non exhaustive). La réalité nous fait constater que l'endroit où poussent les vignes est bâillonné et son influence suspectée de semer le doute dans les esprits.
C'est pourquoi il faut encourager les expériences basées sur l'observation, l'empirisme, au lieu de les considérer comme rétrogrades, car ce regard critique a permis d'établir avec précision la liste des erreurs commises par la viticulture d'aujourd'hui, expliquant bien des choses au profane.

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